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À Paris, Euphrasie Yao, architecte de la paix honorée pour son combat en faveur de l’égalité - Publiée le 03/06/2025

À Paris, Euphrasie Yao, architecte de la paix honorée pour son combat en faveur de l’égalité

Sous les plafonds étincelants du Marriott Rive Gauche, la salle s’est levée comme un seul corps. Ce samedi 31 mai, à Paris, la voix d’Euphrasie Kouassi Yao, posée mais déterminée, a retenti devant un parterre de diplomates, d’experts du développement et de membres influents de la diaspora africaine. Figure emblématique de l’engagement citoyen en Afrique de l’Ouest, l’ancienne ministre ivoirienne a été désignée Personnalité de l’année 2024 par le magazine Africa Managers. Une reconnaissance qui célèbre plus de trois décennies consacrées à la promotion de la paix, de l’égalité et de l’inclusion.Une trajectoire au service de la transformation sociale

Diplômée de plusieurs institutions de référence et aujourd’hui Conseillère Spéciale auprès du Premier ministre de Côte d’Ivoire, la Ministre Euphrasie Kouassi Yao est l’une des rares voix féminines à avoir occupé, sans relâche, les arènes du pouvoir pour y inscrire les droits des femmes comme fondement de toute politique durable.

Elle est également titulaire de la seule chaire UNESCO en Côte d’Ivoire, dédiée à la relation entre l’eau, les femmes et les prises de décision. Une chaire qui n’a rien de symbolique. En effet, elle a contribué à l’intégration systématique de l’approche genre dans les politiques publiques, à la révision de textes juridiques discriminatoires, et à la mise en œuvre d’un quota de 30 % de femmes dans les nominations aux postes de décision.« La paix n’est pas l’absence de violence, mais un état de dignité partagée », a-t-elle affirmé dans son discours, empruntant à Gandhi, Martin Luther King et au père fondateur de la Côte d’Ivoire moderne, Félix Houphouët-Boigny. Son propos, résolument tourné vers l’action, mettait en garde contre l’indifférence des élites face aux fractures sociales. « Rester spectateur, c’est déjà prendre parti contre la paix », a-t-elle lancé.

Dans une année électorale particulièrement tendue en Côte d’Ivoire, ses paroles sonnent comme un rappel : les sociétés fragilisées n’ont plus le luxe de l’attentisme.Le COCOFCI, catalyseur de talents féminins

Euphrasie Kouassi Yao n’en est pas à son premier engagement. Après la crise post-électorale de 2010, elle a conçu le Compendium des Compétences Féminines de Côte d’Ivoire (COCOFCI), un outil stratégique pour recenser, valoriser et promouvoir les talents féminins du pays, au-delà des clivages politiques ou ethniques. Aujourd’hui, ce répertoire inspire d’autres pays africains dans leurs politiques de parité.

Mais la vision de Dr Euphrasie Kouassi Yao ne s’arrête pas aux frontières nationales. Avec CREA-PAIX 2025, une nouvelle campagne axée sur la non-violence active, elle ambitionne de fédérer une génération autour de l’action pacifique. Elle a également annoncé le lancement du réseau ADWIN (African Descendant Women Impact Network), prévu se tenir les 5 et 6 juin à Abidjan, soutenu par plusieurs Premières Dames du continent dont Mme Dominique Ouattara, Première Dame de Côte d´Ivoire, visant à autonomiser un million de femmes d’ici 2030 grâce à l’intelligence artificielle et des partenariats transcontinentaux.Une distinction symbolique, mais insuffisanteL’Ambassadeur de Côte d’Ivoire en France, Maurice Kouakou Bandaman, a salué une « pionnière du genre » qui « a su faire évoluer les mentalités et les pratiques institutionnelles ». Un hommage appuyé, à la hauteur du défi qu’elle incarne.

La Côte d’Ivoire, classée première sur le continent en matière d’égalité hommes-femmes par l’OCDE en 2023, doit cependant transformer ces avancées en dynamiques durables. Car malgré les progrès, les obstacles structurels demeurent. Ce sont entre autres les inégalités dans l’accès à l’eau, la marginalisation économique et la violence domestique persistante.En marge de la cérémonie, d’autres personnalités ivoiriennes ont été distinguées, à l’instar de Denis Charles Kouassi, Directeur général de la CNPS, pour son rôle dans l’extension de la protection sociale aux populations vulnérables.

Mais dans les coulisses, une interrogation demeure : comment faire de ces honneurs une véritable rupture ? La réponse pourrait bien se trouver dans l’approche patiente, inclusive et visionnaire d’Euphrasie Kouassi Yao. Car, pour elle, le changement véritable ne vient pas d’un discours, mais d’un engagement de tous les instants.

Alpha Mourinho